Pourquoi la baisse des impôts ne renversera pas la popularité de Hollande

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Pourquoi la baisse des impôts ne renversera pas la popularité de Hollande

Date: 9 September 2016 | 7:57 pm

Le ministre de l’Economie et des Finances a dévoilé ce vendredi l’arbitrage du gouvernement pour une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu. Une annonce qui fleure bon le geste électoral, à sept mois de la présidentielle.

C’est une rengaine de plus de trente ans. Baissons vos impôts, à un an, ou moins, d’une élection fatidique. Ce vendredi matin, c’est le ministre de l’Economie et des Finances Michel Sapin qui s’y est attelé, en annonçant un geste d’un milliard d’euros pour les classes moyennes. De quoi assurer aux bénéficiaires une ristourne de 200 euros environ. 

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Si le gouvernement cherche ainsi à légitimer une tendance de baisse régulière des impôts, bien qu’elle soit contestable sur bien des points, l’annonce du jour fleure bon le geste électoral. Il est porté au bénéfice d’une base électorale stratégique pour François Hollande, qui a payé très cher les hausses du début du quinquennat. Le “ras-le-bol fiscal”, c’était avant tout pour les classes moyennes. L’histoire montre pourtant que la pratique n’a pas toujours été couronnée de succès. 

L’impôt sur le revenu, un levier très politique

Depuis 1974, la part de l’impôt sur le revenu par rapport au PIB a baissé très régulièrement. Si l’on regarde les chiffres, les hausses des différents gouvernements n’ont presque jamais été décidées à l’approche d’un rendez-vous électoral. L’impôt sur le revenu a une dimension très politique. La principale exception à cette règle est finalement très récente, puisqu’elle concerne Nicolas Sarkozy, qui a très franchement augmenté les impôts à la fin de son mandat. 

Si l’on écarte le cas Sarkozy, il est finalement assez simple de comprendre pourquoi l’impôt sur le revenu a autant servi à accorder des cadeaux fiscaux. Il est l’impôt le plus visible pour l’électeur, moins indolore que la TVA ou la CSG, qui rapportent bien plus que lui. 

Les impôts augmentent depuis 2012

Pour autant, les Français seraient aujourd’hui tout à fait conscients que la politique fiscale et budgétaire de l’Etat ne peut se résumer au seul impôt sur le revenu. “Les impôts ont fortement augmenté depuis 2012, relève Jean-Daniel Levy, directeur du Département Politique & Opinion d’Harris Interactive. Ils ont le sentiment que cela n’a pas permis pour autant d’accroître la capacité d’action des pouvoirs publics. Mais encore, ils n’ont pas eu le sentiment que cet effort a été assumé par les plus riches.”  

Il faut dire que les prélèvement obligatoires pesant sur les ménages n’ont jamais été aussi élevés. De même, en dépit des baisses successives accordées depuis 2014. Le produit net de l’impôt sur le revenu a augmenté tout au long du quinquennat. Interrogé récemment à ce sujet par Le Monde, le cabinet de Michel Sapin justifiait cette tendance par une hausse mécanique de la fiscalité sur le revenu, liée par exemple à des mesures décidées les années précédentes. 

Des précédents chez les socialistes

Petit retour au 29 janvier 1985. Le ministre de l’Economie Pierre Beregovoy, invité au JT de TF1, promet de poursuivre en 1986 (année des élections législatives), les baisses d’impôts entamées un an plus tôt. Comme le note France Info, il tient alors un discours on ne peut plus actuel, c’est à dire que ce geste fiscal serait permis par une amélioration de la conjoncture économique. “Tout cela nous est rendu possible grâce à l’amélioration de notre situation économique”, disait-il alors. Le 18 septembre de la même année, le gouvernement acte une réduction de 3% de l’impôt sur le revenu, en plus d’une révision des tranches du barème. Un geste insuffisant: six mois plus tard, la droite remporte les législatives, actant la première cohabitation de la Ve république. Jacques Chirac devient le Premier ministre de François Mitterrand. 

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Surtout le fiasco socialiste du 21 avril 2002 montre bien qu’un micro geste fiscal à l’approche des élections ne suffit en rien à convaincre les électeurs. Lionel Jospin a été balayé de la course à la présidentielle dès le premier tour après avoir promis des baisses d’impôts dès 2001. Elles étaient alors légitimées par un contexte économique bien plus favorable qu’aujourd’hui. 

Au vu de ces exemples peu engageants, que peut réellement espérer François Hollande? Le geste fiscal annoncé ce vendredi pourrait selon Jean-Daniel Levy lui apporter des “critiques un peu moins fortes” chez les classes moyennes, sur lesquelles il comptera fortement dans l’optique de 2017. “En revanche, difficile d’imaginer un renversement de tendance” sur cette seule base, estime le sondeur. Il faudra bien d’autres efforts pour inverser cette satanée courbe de popularité.  

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