Un ready-made inédit de Marcel Duchamp en vente à Paris

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Un ready-made inédit de Marcel Duchamp en vente à Paris

Date: 9 September 2016 | 7:03 pm

EXCLUSIF – La Fondation Rauschenberg de New York a confié au galeriste de Paris-Salzbourg et bientôt Londres, Thaddaeus Ropac le soin de vendre cette pièce historique de 1959 pour un prix non dévoilé. Elle serait estimée à 10 millions d’euros.

C’est un petit objet en apparence anodin! Et pourtant, il s’agit de l’une des sculptures les plus emblématiques du XXe siècle. Le marché risque de se battre pour ce Porte-bouteilles de Marcel Duchamp, l’une de ses œuvres majeures, demeurée dans la collection personnelle du peintre Robert Rauschenberg, puis dans celle de la Fondation depuis son acquisition, en 1959.

Ladite Fondation a confié au galeriste Thaddaeus Ropac, l’Autrichien de Paris qui va ouvrir une antenne à Londres au printemps, le soin de placer ce Porte-bouteilles au sein d’une collection muséale afin que l’œuvre demeure accessible au public et aux chercheurs. C’est l’une des conditions de la vente de cette pièce dont il existe cinq versions originales. Elle est la deuxième sur les cinq existantes, aujourd’hui toutes dans des collections privées ou des musées.

Que vaut une telle œuvre dont la galerie Ropac se refuse à donner le prix? «En 1988, Pierre Nahon de la galerie Beaubourg avait une des versions à vendre pour environ un peu plus d’un million de francs, se souvient Martin Guesné directeur de la galerie à l’époque, devenu directeur Europe de l’art contemporain chez Artcurial. Aujourd’hui, elle peut valoir près de 10 millions d’euros. Une telle pièce n’a pas de prix!».

La Fondation Rauschenberg affirme que son conseil d’administration a pris la décision stratégique de s’en séparer afin de créer un fonds de dotation. «Le fait d’avoir un portefeuille plus diversifié, composé de placements financiers et d’œuvres d’art, nous permet de nous concentrer sur notre mission principale, et dans l’année à venir, de lancer des projets de recherche pour notre catalogue raisonné», explique la fondation.

Qu’est-ce que le ready-made?

Pour Duchamp, le terme «ready-made» signifiait la transition de ce qu’il a appelé un «art rétinien» vers une approche intellectuelle de sa propre démarche artistique. L’aidant à se démarquer d’une pratique initiale plus proche du surréalisme et du futurisme, l’objet ouvre les portes de ce qui allait devenir plus tard le fondement de l’art minimal et conceptuel.

Comme l’écrivait André Breton en 1938 dans son Dictionnaire abrégé du surréalisme, un ready-made est un «objet ordinaire promu à la dignité d’un objet d’art par le simple choix de l’artiste».

Comment l’objet est parvenu jusqu’à nous? Après avoir quitté l’Europe et déménagé aux États-Unis en 1915, Duchamp devient une figure majeure de la scène artistique new-yorkaise, influençant de nombreux collectionneurs, conservateurs et surtout une toute une génération d’artistes. Robert Rauschenberg a été l’un de ceux qui ont toujours reconnu l’influence que Duchamp avait exercée sur leur propre démarche.

Le rôle de Man ray

En 1959 les deux artistes participent ensemble à une exposition collective intitulée «Art and the Found Object» au Time-Life Reception Center de New York. Duchamp décide d’y exposer son Porte-bouteilles. Il écrit à Man Ray pour lui emprunter la version de 1935-1936 que celui-ci avait gardé dans sa collection. Malheureusement l’objet a été égaré depuis. Duchamp encourage donc son ami à en racheter un exemplaire au Grand Bazar de l’Hôtel de Ville. Man Ray s’exécute et expédie l’objet à New York.

Comme Rauschenberg l’écrit dans ses notes, il apprend au cours d’une conversation avec Roy Moyer, l’organisateur de l’exposition, que tout est à vendre et c’est ainsi qu’il se décide à acheter le Porte-bouteilles. Rauschenberg avait déjà rencontré Marcel Duchamp en 1953 à la Stable Gallery. Depuis lors, Jasper Johns et lui-même étaient devenus des proches de l’artiste français.

L’exposition de ce Porte-bouteilles ouvrira dans la galerie du Marais le 20 octobre et coïncidera avec le 100ème anniversaire du terme «ready-made». Elle sera accompagnée de photos originales de Man Ray et de trois boîtes à tiroirs de Marcel Duchamp. On verra également des lettres signées de Rauschenberg témoignant de cet achat historique.

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