Scepticisme sur les chances de succès de l'accord russo-américain sur la Syrie

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Scepticisme sur les chances de succès de l'accord russo-américain sur la Syrie

Date: 10 September 2016 | 9:30 am

DÉCRYPTAGE – Ce nouvel accord permettra-t-il de calmer la situation en Syrie ? Ou restera-t-il comme les précédents, lettre morte ?

L’accord conclu entre Russes et Américains sur le dossier syrien a été accueilli avec beaucoup de scepticisme par la plupart des protagonistes d’un conflit aux acteurs multiples, qui a fait plus de 300.000 morts et jeté sur les routes de l’exil des millions de Syriens. Et il n’est pas sûr qu’entre Américains et Russes eux-mêmes, la confiance soit entière pour appliquer cet accord, les deux camps soutenant des parties opposées.

» INFOGRAPHIES – Syrie: après cinq ans de guerre, tableau d’un pays en plein chaos

L’arrangement commencera lundi, premier jour de la fête musulmane de l’Aïd, par «sept jours de réduction des violences», et un large accès humanitaire à Alep et aux autres villes assiégées par les forces du régime de Bachar el-Assad, soutenues par Moscou. Si cette trêve tient, Russes et Américains devront alors mettre sur pied un «Centre de coordination opérationnelle» leur permettant de partager du renseignement pour frapper ensemble les groupes terroristes de l’Etat islamique et la branche locale d’Al Qaïda, le Front al-Nosra récemment rebaptisé Front de la conquête du Levant. En parallèle, Moscou devrait contraindre l’aviation syrienne de ne plus bombarder les zones tenues par Nosra et d’autres groupes rebelles qui souvent coopèrent avec les djihadistes. En contrepartie, les Etats-Unis persuaderont ces groupes rebelles de s’écarter de Nosra, pour ne plus donner un prétexte à Damas et à Moscou de les viser. Cette séquence sera certainement la plus difficile à mettre en œuvre tant la méfiance est grande chez les opposants d’Assad vis-à-vis de Moscou et sur le terrain, les imbrications difficiles à stopper après cinq ans de guerre.

Réserves

Le Pentagone, de son côté, est réservé sur ce plan. «Ashton Carter (secrétaire d’Etat à la Défense) n’a pas du tout confiance en la Russie», souligne un haut-gradé français. De nombreux rebelles eux aussi sont convaincus que les Etats-Unis ont finalement abandonné le dossier syrien à la Russie, qui en août s’est rapprochée de la Turquie, pays qui est la base arrière de nombreux groupes modérés ou islamistes. Les insurgés seront particulièrement attentifs à ce qui se passera à Alep, où le régime syrien, grâce à l’aide russe, a repris son siège contre la deuxième ville du pays, dont la partie est tenue depuis quatre ans par les anti-Assad.

Pour passer de la «déconfliction» à une vraie coopération opérationnelle afin de bombarder ensemble les groupes terroristes, il conviendra aussi que Russes et Américains s’entendent sur qui est «terroriste» et qui est un rebelle modéré. Jusqu’à maintenant, des divergences profondes séparaient Washington et Moscou sur cette question.

Le scepticisme ambiant est alimenté par les échecs précédents, notamment en février dernier lorsqu’une trêve n’avait pas tenu longtemps, faisant capoter la reprise prévue des négociations sur la transition politique à Damas. Cette fois encore, les mêmes questions se posent: la trêve prévue pourra-t-elle s’accompagner du maintien du siège de nombreuses villes par Damas? Comment relancer les négociations politiques sans s’entendre au préalable sur le sort de Bachar el-Assad? Et enfin comment faire en sorte que les «oubliés» de cette trêve – les groupes terroristes Daech et Nosra – ne puissent exercer une nouvelle fois leur capacité de nuisance pour torpiller cette énième tentative pour mettre un terme au drame syrien?

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