Eva Joly, une écologiste libre dans un nid de frondeurs
Date: 10 September 2016 | 6:26 pm
Elle a d’abord rechigné, puis s’est prêtée au jeu. Sur le port de la Rochelle, devant l’image de carte postale qu’offraient les bateaux amarrés, Eva Joly a fini par prendre goût à la séance photo imposée par les journalistes. Et puis, elle a filé à la tribune tête baissée. S’arrêtant devant un stand de livre pour montrer le sien, “le Loup dans la Bergerie”, charge violente contre Jean-Claude Juncker parue en mai dernier. Expédiant au détour d’un couloir une caméra trop pressante de BFM TV.
La candidate malheureuse à la dernière présidentielle était ce samedi l’invitée des journées d’été organisées par les frondeurs socialistes à La Rochelle, où défileront ce dimanche les candidats PS d’ores et déjà déclarés à la présidentielle : Arnaud Montebourg, Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann, Gérard Filoche… Mais pas question pour elle de soutenir un de ces noms. “J’attends la primaire des écologistes”, a-t-elle murmuré. Si la Franco-norvégienne est venue à La Rochelle, c’est “par amitié” pour ses collègues du Parlement Européen, les socialistes Guillaume Balas et Emmanuel Maurel.
“Nous devons lancer une politique d’investissements”
“Ca ne nous regarde pas leurs histoires de primaires”, assure son proche collaborateur. “Bien sûr que l’éclatement de la gauche n’est pas satisfaisant. Mais elle est convaincue qu’il faut un candidat écolo à la présidentielle pour peser dans le débat. Elle aurait aimé que Nicolas Hulot y aille. Mais pour l’instant, elle n’a pas prévu de soutenir un des candidats en lice à la primaire des écologistes.”
De fait, la députée ne s’est pas attardée dans les couloirs du forum Perthuis, là même où une flopée de frondeurs socialistes hostiles au couple Hollande-Valls se perdaient en conjectures sur l’état de la gauche à l’approche de la présidentielle. “Elle n’aime pas trop les petites phrases. Les éléments de langage, elle ne sait pas faire”, explique son entourage.
Ce samedi après-midi, l’écologiste s’est contentée de ce qu’elle sait faire de mieux, c’est à dire parler du fond, prenant part à deux discussions ayant pour thèmes ses sujets favoris. La première s’intitulait “Notre adversaire, c’est toujours la finance”, la seconde “l’Europe est morte, vive l’Europe”…
Sa diction n’est pas toujours très claire. Le fil de son discours non plus. Elle a d’ailleurs fait rire l’assistance en confondant “Rocard” et “Ricardo”, cet économiste libéral dont l’Europe d’aujourd’hui applique encore selon elle les recettes. Mais à la tribune, l’ex-candidate écolo a déroulé sa vision de la crise économique et démocratique que traverse l’Europe. Son mantra pour en sortir : la relance budgétaire.
“En créant de la pauvreté, les politiques austéritaires préparent l’arrivée des nationalistes et des populistes”, a-t-elle pointé, recueillant ainsi des applaudissements.
“Nous devons lancer une politique d’investissements. Et pour cela, il nous faut convaincre les Allemands qu’ils sont dans l’erreur. Et cela peut-être fait à traités constants”, a-t-elle poursuivi.
“C’est une femme de thématiques”, observe l’eurodéputé Guillaume Balas. Et de résumer. “Elle a été candidate à la présidentielle. Là, elle ne le sera pas. Le reste, elle s’en fout.”
Rémy Dodet