Marseille : le président du consistoire israélite au tribunal
Date: 15 September 2016 | 4:00 am
Zvi Ammar est jugé ces jeudi et vendredi pour entrave à la justice. Il est accusé d’avoir récupérer un sac rempli de billets sur une scène de crime devant son entreprise. Ce qu’il nie.
Changement d’ambiance pour Zvi Ammar, le très influent et médiatique président du consistoire israélite de Marseille, qui délivrait ses vœux la semaine dernière encore au tout-Marseille à la grande synagogue lors des célébrations du nouvel an juif. Ces jeudi et vendredi, il se trouvera, à 56 ans, sur le banc des accusés du tribunal correctionnel de Marseille. Il est reproché, à celui qui est également président d’International Sport Fashion (ISF), devenue depuis Sport Négoce International, d’avoir récupéré un bagage plein de billets dans une voiture dont le conducteur venait tout juste de se faire assassiner. Et l’homme, salarié de son principal fournisseur, sortait d’un rendez-vous avec lui…
Zvi Ammar comparait aux côtés de son frère jumeau Simon, renvoyé pour recel, et du passager de la voiture, pour avoir fait «obstacle à la manifestation de la vérité» en «modifiant l’état des lieux d’un crime», précise l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction.
346.360 euros en espèce
L’affaire remonte au 8 novembre 2007. Olivier Plançon, 40 ans, directeur commercial d’un grossiste en articles de sport monégasque, Mercure International of Monaco (MIM), est assassiné d’un coup de fusil à canon court tiré à bout portant en pleine face, sur un parking tout proche d’ISF, dans les quartiers nord de Marseille. Deux hommes à scooter le bloquent alors qu’il veut sortir du parking. L’un d’eux tape à la vitre du conducteur puis tire sans sommation. Les deux hommes prennent aussitôt la fuite sans rien dérober. Ils restent, depuis, introuvables.
Plusieurs témoins de la scène ont vu, quelques secondes à peine après la détonation, un homme en chemise blanche – l’un d’eux a identifié Zvi Ammar – venir récupérer les bagages qui se trouvaient dans la voiture. Or un des sacs aurait, selon l’accusation, contenu 346.360 euros en espèces, somme qui sera retrouvée peu de temps après sur les comptes des sociétés de Zvi Ammar. Ce dernier nie toute remise d’argent liquide au jeune homme assassiné. Son frère, qui s’occupait des espèces, justifie les sommes déposées par des encaissements de leurs magasins et des paiements de clients du Maghreb.
Dans les fameux sacs, pas de traces de ces 346.360 euros, mais seulement 15.000 euros en liquide récupérés la veille auprès d’un autre client et une enveloppe contenant cinq traites au bénéfice de MIM pour 820.000 euros et un petit carton sur lequel est inscrit un décompte précisant le type de billets d’un montant total de 346.360 euros! Simon Ammar a reconnu que c’est bien lui qui l’a rédigé. Du coup, les frères Ammar et Adnan Houdrouge, un milliardaire d’origine libanaise patron de MIM, notamment, ont également été mis en examen pour «abus de biens sociaux, recel et blanchiment». Ils sont soupçonnés d’avoir organisé un système de blanchiment par MIM au bénéfice d’ISF. Ce volet fait l’objet d’une autre instruction. Mais ni Jacques Kalpac, un expert mandaté par le juge dont nous avons pu consulter le rapport, ni les services fiscaux, qui ont tous deux vérifié la comptabilité d’ISF, n’y ont décelé des irrégularités.
Parole contre parole
«Cette procédure a dérapé! Personne n’a vu l’argent et pourtant cela représente 8.800 billets, s’indigne Me Gérard Bismuth, défenseur des frères Ammar, Il y a eu des contrôles fiscaux, deux procédures et rien n’a été trouvé… Il n’y a aucune preuve de ce qui est avancé…. Le collègue de Plançon qui était présent a dit qu’il n’avait pas vu d’espèces.» Ce dernier a toutefois fait part de ses doutes au fil des auditions car «les seules traites ne couvraient pas l’encours dû».
Cela va être parole contre parole. «L’argent est le mobile du crime. Ma belle-sœur a dit qu’elle savait que mon frère allait chercher de l’argent, beaucoup d’argent, chez Zvi Ammar», nous commente Fabrice Plançon, frère d’Olivier et partie civile dans le procès. Pauline Plançon a en effet indiqué lors de l’enquête qu’elle savait que son mari devait recouvrer 500.000 euros en espèces ce jour-là. Des salariés de MIM ont d’ailleurs indiqué qu’il y avait du liquide qui circulait dans la société et que Plançon avait pour «fonction occulte» de le récupérer. Pour Fabrice Plançon, «le silence d’Ammar empêche la police d’avancer sur la piste des tueurs car le plus probable est que l’information du transfert de fonds est venue de l’intérieur de la société ISF».
La famille de la victime attend toujours que la police trouve ses assassins